Le Saussinet n°124

Septembre 2022

10260 - Rumilly-lés-Vaudes

Le labourage à Channes - Partie 4

 

En arrière de cette demi-lune, une autre entretoise de métal reliant les deux branches de l’« U » est destinée à recevoir la chaînette de maintien de la goupille de fixation de l’attelage, et une autre chaîne (très forte, celle-là),reliant la partie antérieure de la crémaillère de la haie à l’avant- train.
Enfin, en arrière de l’essieu,une dernière entretoise, très forte, en fer plat et cranté, reçoit une seconde chaîne à forts maillons, pouvant se déplacer sur les différents crans et reliant l’avant-train à la crémaillère de la haie, en sa partie inférieure.
La pièce constituant l’« U » vertical de l’avant-train supporte entre ses deux branches une pièce appelée « chevalet », disposée horizontalement et qui a pour rôle de servir de point d’appui à la haie. La flèche passant entre les deux branches de I’« U est maintenu sur ce chevalet par un manchon incurvé, qui peut se déplacer horizontalement.

Le chevalet, primitivement en bois, a été petit à petit remplacé par une pièce métallique. Il peut, par un système de goupilles s’adaptant à des trous systématiquement pratiqués dans les deux branches verticales de l’« U », monter ou descendre entre ces branches, donnant ainsi à la haie une position plus ou moins inclinée par rapport au sol.

Cette opération se répercute évidemment sur la position du soc, dont la pointe mord plus ou moins profondément la terre. Le mouvement de coulisse du chevalet est, sur certaines charrues, obtenu à l’aide d’une vis sans fin actionnée par une manivelle au sommet de l’« U ». C’est le «régulateur », dispositif plus récent et plus sophistiqué que celui des goupilles.
Enfin, au sommet de l’« U », sont soudés les deux anneaux destinés à assurer le maintien du cordeau. Ces anneaux sont tantôt fixes, tantôt mobiles, tantôt en forme de vrille ou de tire-bouchon, ce qui dans ce dernier cas rend plus facile le passage du cordeau.


Organes d’attelage
Le palonnier, ou éprène (Channes), est constitué par une barre horizontale, d’une longueur de 1,20 m. au minimum, et portant, à chaque extrémité un crochet destiné à recevoir les traits au cas où l’attelage n’est qu’à un seul cheval. Au cas où deux chevaux sont utilisés de front, chaque crochet reçoit un palonnier intermédiaire, semblable au premier, qui reçoit à son tour, à chacun de ses crochets terminaux, les traits de l’attelage. A Channes, à Maisons, ce palonnier intermédiaire est appelé "éprèniau".
Le palonnier peut être en fer ou en bois. Sa structure varie suivant le matériau utilisé

 

Les accessoires
- Le fouet
Sur le mancheron de droite (ou de gauche si le laboureur est gaucher) est fixée la douille où se trouve le manche du fouet. Ce manche souple, en bois de coudrier, mesure environ 2 mètres de long. Une mince lanière de cuir blanc de longueur égale est fixée à son extrémité par une « enchapure ». Cette lanière se termine par la « mèche », ficelle fine et très solide, d’une dizaine de centimètres que, sans doute par suite de son utilisation, on appelle du « fouet » ou encore du « fouat ». Cette mèche sur laquelle on fait un ou deux noeuds, permet d’obtenir ce claquement caractéristique qui stimule éventuellement le cheval dont l’ardeur défaille, ou lorsqu’un effort exceptionnel lui est demandé. Il suffit de le faire claquer à son côté ou à la rigueur de lui en chatouiller la croupe ou les flancs pour obtenir le réveil de son activité.

 Le fouet s’appelle aussi la « varge » (Bertignolles, Chervey), ou la « vorge » (Channes).


- La perche
En dehors des opérations de labourage proprement dites, et lors des déplacements de la ferme au lieu de travail, le soc de la charrue ne doit pas attaquer le sol et pour ce faire, être maintenu au-dessus de son niveau. On obtient cette position dans la majeure partie des campagnes, en coinçant tout simplement en dessous du bloc-soc une perche, suffisamment rigide, prenant d’une part appui sur le sol, et, attachée à l’autre extrémité par un cordeau ou une chaînette contre la haie.

Le bout de la perche sert ainsi de support pendant le parcours.
 

- Le trainet
Un dispositif moins rudimentaire a été par la suite utilisé pour remplacer la perche. On place sous le bloc « travaillant » une paire de petites roues porteuses fixées à ce bloc par leur essieu. Ce dispositif s’appelle le « traînet » ou dans certains villages (Channes, Riceys) le « traîniau ».

 La charrue devient ainsi un engin à quatre roues et les parcours en sont rendus plus rationnels.


- Le cordeau
Le cordeau constitue le lien matériel entre l’homme et le cheval, pendant la conduite de la charrue. Il est constitué par une cordelette à la fois souple et résistante, d’un centimètre de diamètre environ. Sa longueur est en général de huit mètres. Elle est répartie en deux branches égales, allant du mors du cheval aux mancherons de la charrue.
En agissant sur l’une ou l’autre branche, le laboureur peut, tout en continuant à maintenir sa charrue, obtenir du cheval un changement de direction soit à droite soit à gauche, et diriger ainsi la marche de son attelage. Une traction simulée sur les deux branches du cordeau provoque l’arrêt. (Le cordeau : en début de siècle, un cordeau de 8 mètres était vendu à la foire d’Arthonnay (pays de l’Yonne, limitrophe de Channes), 2,40 F, soit 0,30 F (six sous) le mètre)

 


Conduite
Trois éléments entrent en jeu pour la conduite de la charrue pendant le labourage : la voix, le cordeau, le fouet.
Les deux premiers sont en pratique utilisés simultanément. C’est particulièrement lors des travaux de labourage que s’établit entre l’homme et le cheval une liaison verbale quasi constante. Un cheval bien accoutumé à son maître lui obéit simplement à la voix sans qu’il soit besoin d’utiliser le cordeau ou le fouet. Mais il est certes indispensable que l’animal soit traité en ami et non en esclave. D’ailleurs cet animal n’est-il pas le compagnon de travail du paysan ? Il doit exister entre eux une sorte de compréhension et d’intimité réciproques. La brutalité, pour obtenir l’obéissance, ne donne aucun résultat valable et ne fait qu’avilir son auteur. L’animal soumis aux coups de fouet, aux jurons et aux cris, s’abrutit et ne peut fournir qu’un mauvais travail. Fort heureusement, le paysan, en général, en est conscient, et dans la majorité aime son cheval et s’y attache. Il existe certes des exceptions mais cela est une autre histoire...

 


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