Le Saussinet

n°37

Juin 2014

10260 - Rumilly-lés-Vaudes


Petite histoire anecdotique de Rumilly


Nos cloches et leurs cérémonies

C’était en 1865, le dimanche 2 juillet, le conseil de Fabrique dûment convoqué s’était réuni au presbytère.
Etaient présents, M. le curé Meunier, M. Paillot, maire, MM. Hénaut, Dart, Vuibert Philogone et Juvenelle, membres, sous la présidence de Monsieur. P.A. Recoing, président.

Une question était à l’ordre du jour et concernait la sonnerie des cloches ; un règlement détaillé des conditions de travail imposées aux sonneurs-fossoyeurs fut élaboré, suivi de deux nominations, celles de Ernest Chemelat et de Paul Philbert. Ce dernier et les membres de leur famille devaient assurer le même service jusque vers 1940, date à laquelle M. Maxime Philbert et M. Jules Philbert abandonnèrent le service des fosses et du clocher.



Fondu avec la cloche : Saint Sébastien


Fondu avec la cloche : Saint-Sébastien




Les obligations des sonneurs.

Les sonneurs d’antan avaient de multiples obligations. Tenus à annoncer tous les services religieux qui étaient nombreux, ils le devaient faire de façon différente selon l’importance de la fête. Il leur était indiqué avec beaucoup de précision, la ou les cloches à sonner, quand il devaient le faire, et la manière aussi. Leur rétribution était expressément mentionnée. En 1764, pour 4 laisses, ils percevaient trois livres plus un pain et une pinte de vin en faisant la fosse.
Ils s’engageaient à la même époque à sonner les “nuées” en cas d’orage et de tonnerre, à assurer la garde des cloches, à les graisser (et, pour cela, fournir l’huile), à soigner enfin les peupliers plantés dans les prés de la Fabrique. Pierre Sardin, maître d’école, avait accepté les dites charges avant de s’en démettre peu de temps après au profit de Claude Debure.
C’est que le maître d’école, outre sa classe, avait bien d’autres obligations telles que d’ôter les neiges de dessus les voûtes de l’église ou de dresser le reposoir. Les sonneurs devaient lui prêter main forte et ainsi qu’aux marguilliers lorsqu’ils chassaient les araignées et nettoyaient le pavé une fois l’an, avant Pâques.
Ainsi firent, à compter du 29 juin 1776 : Louis Mignant, Nicolas Morel et Pierre Cadet.
Il est vrai que ce dernier se rendit bientôt coupable de divers méfaits dont quelques insultes à l’adresse d’une veuve lors de l’enterrement du mari. Aussi de nouveaux sonneurs-fossoyeurs furent-ils nommés : Prosper Debure et Jean-Baptiste Hénaut.
Le métier leur convint-il ? Il est permis de n’y pas croire puisque la fabrique, le 28 avril 1816 met le dit service en adjudication.
L’adjudicataire se trouve être Pierre Cadet dont les fabriciens avaient eu à se plaindre il n’y avait pas trois ans ; aussi s’emploie-t-on à annuler l’affaire et finalement, sont désignés Edme Mathieu Thiroine instituteur, et Barnabé Dutertre.
Ceux-ci devaient percevoir directement leurs honoraires auprès des familles mais payer chacun à la fabrique trois francs pour l’année. Sonneries et fosse pour un gros corps (un adulte) valaient alors 3,5 francs.
Tout n’allait pas pour le mieux. Edme Mathieu Théroine fut remplacé dans son poste d’instituteur. Son remplaçant continua, à ce titre, de sonner l’angélus du midi et du soir. Accepta-t-il la fonction de sonneur-fossoyeur ?
Ceux qui, en tous cas, prirent le relais durent profiter de la situation. Ils exagérèrent certainement et, près de 50 ans plus tard, il était nécessaire de signaler les abus qui existaient tant dans l’ordre des sonneries que dans la rétribution. A nouveau, en 1865, on fixait les tarifs : 6 francs pour un gros corps, un pain et un litre de vin.

Ce que disaient les cloches.

Que disaient donc ces cloches à la corde desquelles s’agrippaient nos sonneurs ? Les anciens nous ont confié qu’il n’était que d’écouter pour comprendre. Ils affirmaient que ce qu’elles sonnaient, elles le disaient comme on le chante.
“Viens corps blanc, Dieu t’attend”, “Le corps est mort, l’âme n’y est pas”, à l’occasion d’un enterrement.
“Viens, viens, malheureuse viens” avant un mariage, s’adressant à la jeune mariée.
Et le carillon ironisait : “Des pommes de terre et des oignons”.

Le carillon.

Ce carillon, quel regret avons-nous de n’avoir jamais pu l’entendre. Pourtant se sont conservés les airs funèbres accompagnant le corps des défunts, homme ou femme, et la manière de sonner le tocsin.
Mais le carillon ! Ceux qui le savaient exprimer ne sont plus, et l’air en est presque perdu. Le souvenir seul, par bribes, est resté qui distingue encore le carillon fantaisie “Le roi Dagobert”, “Marie trempe ton pain” et la sonnerie classique dont nous aimerions tellement retrouver la mélodie.
Comment les sonneurs s’y prenaient-ils ? Nous savons qu’ils s’installaient au clocher où ils disposaient d’un siège et qu’ils avaient à portée des mains trois cordes reliées d’une poutre voisine au battant de chacune des cloches, ce battant immobilisé à quelques  centimètres du bronze intérieur. D’un coup nerveux du poignet ou même de la cheville, les sonneurs pouvaient ainsi, rapidement, obtenir le son désiré ; peut-être aussi utilisaient-ils le maillet de bois qui, sur la panse ou le cerveau de l’instrument, adroitement frappé, obtenait un son différent qui complétait ainsi les trois cloches par une quatrième note.

(Suite au prochain numéro.)

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