Le Saussinet n°67

Février 2017

10260 - Rumilly-lés-Vaudes

Chaussepierre, les templiers et la sainte (Partie 3)

 

Des bâtiments neufs.

La ferme fut entièrement reconstruite, les écuries en 1833 et la maison d’habitation en 1843 ainsi qu’en témoignent les dates gravées sur deux pierres du nouveau bâtiment.

On avait orné de statues la façade ouest de la maison, chacune dans sa niche, la belle Hélène en pied au-dessus de la porte principale et, de chaque côté, logés haut dans le mur, les bustes de Priam et de Ménélas. (16)

La Sainte.

Si la disparition de cette Hélène de plâtre ne nous laisse aucun regret,nous déplorons en revanche le peu de soin qu’on prit de la Sainte et de son abandon progressif.

Quelle était donc cette Sainte ? Tout à la fois une statue de plâtre (elle aussi), une source, un monument sans style et une belle histoire.

A quelques dizaine de mètres des bâtiments, avant d’arriver à la ferme, non loin du chemin qui conduit au hameau de Nicey, sur la pente qui domine la plaine alluviale de l’ancienne Seine, s’élevait une chapelle bâtie selon un plan circulaire à laquelle on accédait par quelques marches.

Les fondations abritaient un bassin de pierre au milieu duquel jaillissait une filet d’eau ; on parvenait à la fontaine en descendant sur les côtés du monument et en le contournant; la porte de la chapelle regardait ainsi le sud tandis que la crypte s’ouvrait au nord. L’effigie de la Sainte faisait face à l’entrée inférieure, logée dans une niche, sous une sorte de soupirail qui prenait jour au milieu des marches de pierre qui menaient à l’étage du dessus.

Il est probable que, depuis fort longtemps, la source de Chaussepierre était vénérée et que, de tous temps on y était venu boire son eau et en espérer la guérison de certaines fièvres. Ce n’est qu’à la fin du dix-neuvième siècle que ce lieu fut dédié à sainte Geneviève sans pour autant que le peuple lui en donne le nom ; on fit de cet endroit un lieu de culte jusqu’où venaient chaque année certaines processions.

Tout au début du XXème siècle, cette fontaine fut “exploitée” par Monsieur Maxime Honnet qui mettait des gobelets à disposition des visiteurs, avec lesquels ils pouvaient puiser et boire l’eau du bassin. (Maxime Honnet fut ainsi, en fait, le premier président du syndicat d’initiative de Rumilly.)

Les jeunes gens dont le désir profond était d’être unis, pouvaient aussi, après avoir bu, piquer des épingles dans un superbe coussin de velours déposé au pied de la statue ; ils étaient assurés, après avoir accompli ce geste, que leur mariage serait célébré dans l’année. Là encore, l’offrande n’était pas nouvelle et il est certain que des quantités d’épingles ont dû être jetées dans la source de Chaussepierre avant qu’elle n’ait sainte Geneviève pour patronne et bien avant que la chapelle ne fût construite (Le chemin qui, de Saint-Parres, mène à la source de la Sainte, était le chemin de la Feulie, de la Fée, preuve que la source était honorée déjà en des temps pré-chrétiens.).

Les parents de Madame Caillet, vers 1890, alors qu’elle était enfant, lui avaient formellement interdit de se promener “du côté de la Sainte” parce que les couleuvres y étaient dangereuses. Un beau jour cependant, “alors qu’elle gardait les vaches dans la voie qui traverse le ru, voilà des gens qui s’approchent d’elle, lui demandent “après” la Sainte et lui avouent qu’ils désirent poser des épingles.” C’est à compter de ce jour qu’elle a su les vertus qu’on attribuait à la source de Chaussepierre.

Si la Sainte passait pour favoriser les mariages, on disait aussi que laver ses mains dans l’eau de la source portait bonheur. Une autre coutume voulait encore que les mamans déposent sur l’eau, lorsqu’un bébé était malade, une pièce de vêtement appartenant à l’enfant ; que la brassière s’enfonce était mauvais signe, l’enfant était condamné ; si, par contre elle restait à la surface, on en déduisait que l’enfant vivrait.

Le temps est venu d’un certain oubli. La statue de sainte Geneviève gît, décapitée, près d’un filet d’eau qui n’intéresse plus personne. Il ne reste plus de la chapelle que des murs en ruine.

La Sainte n’est plus, Hélène a disparu. (Avec elle, la margelle hexagonale et armoriée du vieux puits a été cédée à un brocanteur.)

Avec elles se sont enfuies les dernières images qui, de Chaussepierre étaient la poésie. C’est pourquoi il était urgent que nous les évoquions avant qu’elles ne disparaissent tout à fait de notre coeur et de notre mémoire.

 

La chapelle en ruine

Hélène retrouvée

 

Caveau, crypte

Un caveau existe sous l'autel de la vierge, plus exactement sous la sacristie, lequel a faite naître l'idée qu'un souterrain pourrait relier le manoir à l'église.

Sans penser qu'un tel ouvrage aurait dû passer sous l'Hozain et, de ce fait, être inutilisable.

A quoi était-il destiné ? Probablement à mettre à l'abri des prédateurs, en temps de guerre, les objets précieux utilisés pour le culte…

Un caveau semblable a été signalé dans une autre commune auboise. Où ? Voir une communication à la Société académique de l'Aube.

 

 


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